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Note d'intention

L'idée que nous puissions être une conscience immatérielle enfermée dans un corps, m'intrigue depuis l'enfance. Mon travail s'est naturellement centré sur l'individu lorsque j'étais étudiante à l'école des beaux-arts ; l'être seul avec le souci de le représenter.

Jusqu'en 2016, ma démarche est conceptuelle avec une tendance minimale. Elle s'inscrit dans un questionnement sur le rapport entre l’objet, son identification et sa représentation comme développé chez René Magritte ou Joseph Kosuth. Je travaille sur l'écart entre l'idée et sa représentation, et sur la relation entre réalité physique et réalité virtuelle, par le biais de la performance et de créations graphiques pouvant, parfois, être apparentées à de la poésie concrète, comme dans certaines propositions du Die Wiener Gruppe.

Mes recherches sont alimentées par des lectures : études sur l'organisation anthropologique de l'espace, ou témoignages sur notre patrimoine génétique commun avec l’ensemble du vivant, œuvres littéraires ou philosophiques sur le devenir animal en l'homme.

Depuis 2018, fascinée par les images d'hybrides provenant des mythes populaires et légendes animistes, j'utilise la figuration pour interroger la part animal chez l'individu.

Mes propositions confrontent le spectateur à lui-même, comme une mécanique vivante, organique ou spirituelle, lors d'actions minimales performatives ; des individus exécutent une partition, où ils doivent respirer, marcher ou tomber. À l'échelle de la page, ils sont représentées par un « 1 », une unité, donnée binaire, pouvant être une donnée statistique, un individu géolocalisé. Dans certaines performances, pour rompre le lien qui unit l'individu à la parole, mettre en abyme ; le langage homme est remplacé par le langage oiseau réalisé par un imitateur.

Dans mes derniers travaux, je passe par la représentation figurative, à échelle humaine, où l'homme est partiellement transformé en animal ou en plante, et imprimé sur des bâches publicitaires de fast-food. Ce détour par l'animalité rappelle notre lien génétique ; l’animal au-dedans de nous que nous interrogeons de manière récurrente.

Dans mes représentations l'homme et l'animal ne se valent pas. Les animaux sont différenciés par une taille plus modeste. Ils sont davantage des aberrations, monstres imaginaires inoffensifs ou animaux en mutation. Dessinés sur une surface transparente, ces chimères deviennent des fantômes qui se superposent aux lieux qui les accueillent.

Des mots sont parfois présents, ils ont une place à part, ils se suffisent à eux-mêmes. Dans certaines de mes performances ils énoncent, ils font image. Aujourd'hui, j'interviens sur les textes devenus des pixels sur nos écrans d'ordinateur ; avec un programme informatique, je déforme et révèle la matière dont est fait le texte.

Ma recherche se situe dans la représentation, dans le portrait. La question que je pose est : qu'est-ce qui nous définit ? Est-ce que se sont les éléments qui composent le corps ou l'esprit ? Et de quoi le langage est-il l'objet ?